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Poésies Jean-Luc OTT

QUE DE SAISONS D'ANNEES DE CIELS

Extraits

 

  1.


Janvier - Le vol des cormorans noirs d’eau leurs cris 
solitaires à travers les brumes trempées de longue vie
fantomatique la ville flotte au ras de l’eau

Les voix font des clapotis monotones 
entre les pieux penchés sous le poids de palais déserts
sous l’affaissement de grosses églises 
Nous flottons dans la substance du passé
comme des somnambules dans la brume grise
 
Qu’y a-t-il à ressusciter entre nous ?
Nous sombrons ce n’est un secret pour personne.

 

Ciel terre et eau se rencontrent ici 
Passé présent et futur s’engluent
comme un moteur souffreteux comme se fondent 
les lumières d’argent dans l’étain des eaux 

Quels autres que nous sont ici à regarder 
dans le miroir des murs nus la vie se regretter ?

 

    2.


Plusieurs mondes en toi tâtonnent
c’est là que tout se joue
quand précisément rien n’est encore défini
et rendu possible par le flou
qui fait différence

L’angoisse de la certitude me prenait aux tripes
Quand tout est décidé l’énergie qui s’en échappe
est comme la porte ouverte de la forge
l’envol maintenant déplié des échassiers
écarlates de leur seul bec

Moi je n’ai connu que le monde trouble de l’eau
quand éclairé de l’intérieur 
un maigre poisson se laisse surprendre

Je t’ai aimé pour le possible


              *******

Elle est là je le sais
je peux la suivre à la trace
dans les feuilles à peine mouvementées
dans la tension qui monte en moi
la vague d’émotions qui rend visible les êtres
les questions essentielles

Pourquoi y mettre fin ?
Qu’est-ce que j’y pers ? 
Qu’est-ce que j’y gagne ? 

 

    3.


Je n’ai pas piégé cette âme
sur laquelle trop de harpons étaient fichés
Peut-être n’ai-je pas su m’y prendre
ou profité du moment de faiblesse 
quand tu exposais ton corps 
comme un squale au soleil
Peut-être n’ai-je pas été assez sûr de le vouloir. 

C’eût été arracher ton cœur à la vie ordinaire
donner un autre sens à ton existence 
et anéantir mon œuvre de te distinguer
parmi toutes ces âmes mortes. 

 

    4.


On ne comprend pas le langage simple 
de l’animal la peur au ventre 
je l’entends jusque sous mon toit
La pièce est restée vide
le carrelage a passé de mode
rien n’est plus contemporain
ce n’est pas l’usure mais le temps arrêté

Laisse-moi donner du sens à la nuit
puisqu’elle s’annonce longue
ne me corrige pas de trop d’incertitude
laisse-moi rêver encore 
jusqu’à la nuit des temps

Je ne veux pas savoir si je dis vrai
ce serait renoncer à trop de choses
je ne suis pas prêt pour un combat
je me contente et me satisfait d’exister
dans la boucherie des temps. 

 

    5.


Le matin très tôt je le sais les choses sont différentes
surtout avec la brume qui épaissit les traits
Impossible de savoir si les choses de la nuit
se poursuivent ou s’il s’agit déjà de celles du jour
si différentes

Deux chevaux dont l’encolure blanche
émerge mouillée et majestueuse
Le bruit qu’ils font ensemble 
leur confusion leur souffle mêlé
font naître une illusion de chaleur
dans le pré glacé dans le ciel blanc de neige

Là les mouvements sont lents à disparaître 
ils retournent d’où ils sont nés
dans la trouée du lieu sans lieu


    7.


Ce que je voulais je ne le sais pas moi-même
aujourd’hui bien sûr 
mais il n’est plus temps
Les villes ont pris la place où l’on respirait
les choses immatérielles sont venues donner
vie à d’autres choses

Ce que je voulais c’est d’être avec toi
au présent comme un frère de course
si j’étais cheval comme un repas partagé
une bière entre amis un miracle de tous les jours
sans héros de légende sans exploit ni sujet tabou

La fenêtre ouverte donnerait accès 
aux odeurs des champs alentours 
aux bruits intemporels et ta voix
couchée sur le dos non loin
dans l’herbe imaginaire 
réveillerait mon ciel d’été. 

 

    8.


Si l’été se discrédite en sécheresse odorante 
en chemin crevassé si les bras entortillés 
de la glycine donnent la mort
si la pluie se fait prier comme une orgueilleuse
si le soleil tombe sur ta tête inclinée
faisant une tache d’ombre sur ton sourire
c’est qu’il est temps de te perdre à nouveau
de secouer la cendre qui colle à la peau
de desengendrer les fruits du soleil
pendus à l’arbre de mai
C’est d’abattre l’arbre planté dans la mémoire

Vivre après cela relève de l’invisible
Rien à voir avec la volonté de paraître
indifférent à l’usure qui faisait vivre
dans ce lent dénouement avec l’insolence 
d’imaginer être maître en ces choses
Te voilà refroidi méticuleusement arrêté
dans la course du temps. 

    9.


Mes mots te suivront à la limite des portes
aucun ne saurait aller au-delà
le navrant passage extérieur
est pour toi seul

Quand bien même tu devrais avoir une nouvelle jeunesse
là-bas
elle ne me concernerait pas
je serai absent à elle

Que de saisons d’années et de ciels
m’ont donné la patience et l’âme sereine
A présent il n’est plus seulement besoin 
de paroles mais de myriades de temps

Va-t’en dormir si tu peux 
aux portes de la ville 
à l’ombre des châtaigniers

 

    10.


La pluie tombe drue sur les fils électriques
Nuits et jours les ampoules restent allumées 

Que de saisons d’années de ciels passés
j’attends
Les rues sont désertes méconnaissable
le village à l’aune de ma mémoire 
Je devinais la jeunesse ses pas résonnent
Ressuscitée comme revenue de la guerre 
elle serait sans séquelle ni péché comme avant 
mais il n’y a pas eu la guerre 
cette chance nous a été donnée à nous seulement

Et pourtant quelqu’un a trahi l’autre
Ça tenait à presque rien 

Dis-moi te souvenir 
de l’impossible bonheur 
de l’été de toutes les grâces
et donne-moi seul à seul 
la paix que j’attends. 


    11.


J’ai compté toutes les minutes nécessaires
pour que ton sommeil vienne
toutes les heures où il t’a pris dans ses bras
pour te soulager toutes les années
Quand tu étais malade et grelottais dans ton t-shirt

Au réveil la pièce était vide 
comme si le mal avait fui avec toi
comme s’il t’avait appris quelque chose
sur ma froideur que je n’étais pas 
en mesure de comprendre moi-même
C’est difficile de se faire comprendre 
quand soi-même on se cherche 

Aujourd’hui tu es 
Aujourd’hui je suis
Étrangers l’un à l’autre
Tu manges et bois en famille quand j’ai le dos 
tourné tu ris avec tes amis tu vis
quand j’ai les yeux ouverts
et tu n’entends rien de ce que j’écris
Tu ne m’attends plus
En somme nous n’avons rien partagé
qui puisse se dire. 


   13.


Tant de choses m’échappent ou me sont indifférentes
mais il suffit que je m’absente un instant
dans la nuée d’oiseaux autour de la boule de graisse
un instant suffi pour qu’explose l’été 
et mon cœur avec.

J’écris et tout ce qui ne sert à rien sort de moi
comme des nuages informes sans pluie se forment d’un rien
Chaque fois une nouvelle chose me ramène à toi
comme si j’avais pris inconsciemment la même route 

Le jus acide des pommes vertes ton visage
penché au-dessus du mien que je ne devine plus
au croisement moi tout petit pas plus gros 
qu’une boule de plumes et la campagne qui tient 
l’été dans tes mains l’été toujours rien que ton été

Il se peut que je n’aie pas vraiment existé
à ce moment précis ou vécu tout autre chose
mais j’ai ce goût dans la bouche 
des pommes pas mûres qui remonte sans cesse

 

    14.


C’était surtout la lumière qui parlait
une lumière saturée qui gâche la pellicule
et brûle le temps l’herbe et les yeux en premier
mais l’herbe ne meurt pas 
sa force est exemplaire - qui rivaliserait ?

Je ne serai pas oublié j’ai tout fait pour cela
parlant avec toi comme avec moi-même
discrètement parce qu’ailleurs ta vie étant belle
et pleine 
une joie indifférente comme savent si bien 
faire ceux qui vivent pleinement
J’ai mis longtemps à comprendre
j’ai longtemps cherché 
parce que le temps je l’avais pour moi
plus qu’assez pour savoir tout 
ce qu’il convient de connaître 
de la solitude des adolescents

Les peupliers sont devenus jaunes 
plusieurs fois avec le même bruit
dans leurs feuilles celui-là même
que tu as entendu comme moi
qui promettait tant de choses
je ne veux plus l’entendre 
je ne le supporte plus. 

 

    15.


C’est à cause de l’impatience de l’époque étriquée
du temps trop court pour prendre conscience
c’est à cause de notre jeunesse  - un jardin sous le soleil 
qui remue les terres – du monde qui nous enviait
c’est à cause de l’été dans ta voix

Ta voix je l’ai cherchée partout dans ma chair 
là-bas dans l’indifférence des paysages 
dans les recueils des autres pour savoir lire en elle
Elle qui pouvait me soulever comme dans les rêves
volent les choses parce qu’il n’y aura jamais plus quelque chose 
de semblable parce que la vie est autre chose - depuis
 
J’ai tout dit - Tout a été dit maintes fois
ma version seulement puisque tu ne diras rien
Il reste qu’on grandit après cela sans transition
aucune Il paraît qu’en vieillissant on se durcit 
qu’il arrive même qu’on haïsse 
ceux qui nous ont fait du bien

Le passé me regarde du haut de sa chaire 
en chien de faïence je n’ai rien fait pour te retenir
je n’ai rien tenté si tu avais pris le temps dans tes mains
le présent n’aurait pas eu de fin.

 

    16.


Je ne refuse pas le bonheur il m’éprouve
me contrarie comme un tronc trop souvent
meurtri se boursoufle il se rencogne

Même si je regardais exactement au même endroit
de la fenêtre je n’aurais jamais une fraction même infime 
de ta pensée je ne verrais jamais ce que tu vois

A quoi bon la route qui serpente l’alignement
des peupliers les champs de maïs en contrebas
ton image figée dans la nuit dans l’exacte
localisation du temps qui a croisé nos espérances

Je ne sais pas ce que tu regardes en contrebas
de ta vie s’il t’arrive encore d’être émouvant
devant ce qui vient ému de ce qui a été

Moi je regarde en moi où est l’évidence
dehors il n’y a rien de changé. 

 

    17.


Le plan d’eau est là bouffi d’orgueilleux 
silences son œil morne ne parle plus
ce pays a trop de lassitude pour parler encore
Je n’y trouverai pas ce que j’y suis venu chercher

Pourtant tout est à sa place 
à ma manière fidèle le pollen fécond 
et fragile ramené dans le coin 
aux branches basses sans issue

Tout ça est bien inutile 
et n’accueille aucun repos
Les choses s’écoulent au loin
indifférentes au passage du temps
là où nos paroles n’entrent pas
là où nos paroles ne sont plus

De toutes mes forces et de toute évidence
je parviendrai au fond 
dans l’état de dépendance
où je suis resté


    18.


Année après année les vieux pommiers 
délaissent leurs fruits qui jonchent le sol 
C’est parce que l’on n'arrive pas à mettre les mots 
sur les pensées les mots sur les sentiments
les sentiments sur les émotions
C’est parce que tout cela 
qu’il est difficile d’être ensemble

Et pourtant il n’est pas possible de faire
autrement que de vivre ensemble
à distance peut-être 
à travers tant de choses qui nous séparent
nous sommes quand même ensemble

Les obstacles ne sont rien
les distances ne peuvent compter
le temps s’invente au fur et à mesure des raisons
avec son sac plein d’encre et d’artifice
Te connaître serait comme la fin de quelque chose
Mais les pommes jonchent le sol année après année
pourrissent et donnent à la terre cette odeur forte 
d’abandon.


    19.


Tu ne cèdes pas
On ne fait pas un si grand chemin 
pour dire que l’on n’a rien vu
Je parle de choses vivantes qui nous échappent 
et que l’on voudrait tant retenir
Il n’en est pas de même pour toi qui as choisi

Te regarder manger et sourire
te regarder dormir dans les mêmes draps
parfois te mettre en colère contre un monde 
trop las je ne sais pas combien de temps
aurait duré le bonheur jusqu’à l’orée des ténèbres

Je ne demandais qu’un simple accord 
une transaction entre adultes
mais tu restes inflexible comme si
la fierté se nichait dans les détails

Le seul à planter quelque chose c’est 
quand même encore toi lorsque tu ne dis rien
et que ton dos est courbé 
comme un saule nain. 


    20.


Avant il y avait à peine du chagrin
à présent il s’impose comme un fait 
intarissable il me travaille
il s’insère dans les fentes de la chair
pour me regarder souffrir 
incapable d’audace comme avant. 

Le temps ne passe pas
pas une ride pas une vergeture sur ta peau lisse
obsessivement mienne par la pensée pure
Qu’importe l’infini renouvellement de l’époque
les préoccupations du jour 
pour moi le temps s’est arrêté
le monde s’est figé dans l’outre temps.

Suis-je seul dans le souvenir 
où survit la parole emprise dans l’eau 
glacée du négligeable
dans la lenteur d’une drôle de trêve ?


    21.


Je sais compter et je vois bien que l’attention
n’est plus la même qu’il est nécessaire de reposer
les yeux et l’attention vers ce qui a moins 
de mouvements vers les choses essentielles
Tout ce que nous avons vécu ensemble il est inutile
de le répéter il est écoulé il s’écoule encore

Le temps est grand seigneur il dit ce qui s’efface
et ce qui ne peut finir
Si l’amour a pris d’autres formes c’est qu’il ne peut
finir demain encore quand le monde sera 
dans sa forme nouvelle enjambant tant de morts

Encore la jeunesse triomphera dans l’amour
quelle que soit sa forme sa pudeur ou sa foi
parce que c’est ainsi que le monde est beau. 

 

    22.


On a murmuré et le bruit s’est diversifié
comme les herbes dans les prés
s’est multiplié avec le vent dans les feuilles
Il est fini le temps où l’on n’entendait
que la voix de l’homme

Il faut penser à tant de choses
pour faire un deuil 
mais à quel prix se résigner ? 
Tout nous aurait été offert quelle joie
quel bonheur c’eût été quelle envergure

Mais nous nous savions perdus 
avant même de nous élancer 
avant même de nous comprendre

Un jour l’oiseau renaîtra en nous
ce sera la fête un jour je le sais.

 

    23.


Un chagrin immense impitoyable sourdait 
de ta beauté Il dure encore alors que tu n’es plus
qu’une idée qui tourne autour de moi
comme un bourdon à l’état sauvage

Nous sommes soumis et lâches
car la douleur nous la connaissons
et vivons avec elle au jour le jour

Ce que tu désires encore je ne le sais pas
Tu es partie avec la jeunesse 
et comme elle tu ne reviendras pas
je sais que tu n’existes plus qu’en ma mémoire
et que moi seul parle encore de toi
comme si je l’ignorais

Jamais été ne fut plus chaud ici 
ni chagrin plus long
ni chaude l’odeur d’herbe sèche
dont s’est imprégné ton corps.


              *******

Qui d’autre a profité de ton champ ?
qui d’autre a goûté les fruits que j’ai mûris ?
Je suis entré dans la meute des jours
contre la volonté des chevaux
ému par la bataille oublié de la victoire

 
    24.


J’aimerai tant raconter des choses simples
qui coulent de source descendent
les marches une à une pour consolider
le temps de l’action une amitié vertigineuse 
une époque écoulée qui traîne 
ses racines insatiables jusqu’à nous 
et non ces intimités inutiles 
inoffensives embarrassantes 
qui ne parlent à personne
du moins de ce monde-ci. 

Voilà ce que je pensais - qu’il est 
inutile de vouloir affronter encore 
ce qui vient avec ce qui n’est plus
de mélanger les terres putrescibles

car c’est oublier que la terre fait 
une rotation sur elle-même 
sans remonter le temps
c’est oublier que le monde est indifférent
à nous qui ne sommes rien 
dans la multitude. (des vivants et des morts) 

 

    25.


Je n’ai jamais été en paix avec moi-même
ni avec toi par la même occasion
toujours à attendre la saison qui vient
comme si elle devait résoudre les manques
l’esprit tourné vers celles passées
comme s’il s’y trouvait le socle l’ancrage
de forces et de quiétude imaginaires.

Alors que rien n’est jamais sûr
Jamais il n’y eût de paix de part le monde
même lorsque les armes se sont tues
et qu’il fallut que la liesse écrase les heurts 
comme les bourgeons de mars 
les blessures de l’hiver les pruniers blancs
les cognassiers simples comme bonjour
aux fleurs à la consistance aussi légère 
qu’un souffle de printemps
Tout ça est bien réel 
et fugace comme l’idée même de paix
qui m’échappe qui saisit l’instant 
que je n’ai su voir. 

 

    26.


Je suis prêt  
Et tu me diras des mots 
pour me retenir c’est comme qui dirait
ton essence même notre raison d’être

On ne comprend pas le langage simple
la peur au ventre la joie animale
je l’entends par les veines et le sang 
qui remontent les pentes vertigineuses du temps

Je me sens prêt 
Le jour est humide presque mouillé 
les feuilles lourdement vertes
s’égouttent avec la pluie fine
Nous avons fait la guerre sans mort
mais pas sans dégats puisque le goût 
des fruits du verger a été piétiné 
et que ne s’élèvent plus les aurores phosphorescentes
il n’y a plus de voix pour te répondre
puique tout est dit
Bien sûr nous ferons la paix et il se pourrait
que tu le veuilles vraiment pas pour un temps
seulement mais pour que je voie désormais 
en toi ce que je n’y ai pas vu 
Mais il n’est plus temps il manque toujours
pour dire tout ce qu’il y a à dire de ce temps-là. 

 

    27.


L’été s’attarde à sentir les fruits dans les talus
les yeux fermés je sais que tu es quelque part

J’ai vu depuis tous les étés se débrouiller sans nous
Ce pays que j’aime n’a pas réussi 
à te retenir toi et tes besoins de fugues
cherchant ailleurs la paix intérieure

Peut-être as-tu peur d’entendre ma leçon
de solitude peut-être qu’il n’est pas bon
de rester ainsi debout à guetter l’orage 
à espérer ce qui ne peut pas venir
du ciel ni par le vent venu 
de l’intérieur ni par cette porte 
que tu ne connais pas 

ni par nos regards perdus 
égarés l’un dans l’autre. 

    

Jean-luc ott
Strasbourg, 2022

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